Je connais le travail de Tom Spianti depuis quelques années déjà à travers les portfolios de mes propres modèles qui parfois ont travaillé avec lui, mais c’est par pur hasard que nous avons échangé/débattu technique sur le statut Facebook d’une amie en commun, et que j’en ai profité pour lui passer mes compliments sur son travail.
Je ne sais plus exactement comment, mais un soir alors qu’on discutait toujours par écran interposé, on s’est dit que c’était bêta de ne pas se croiser, en vrai.
Il a débarqué avec un appareil photo, on a but des verres de vins, et on a fait quelques portraits rapidement, juste pour voir, et je l’ignorais à ce moment là, mais on a continué un petit moment dans cette spontanéité qui correspond bien au personnage, à refaire le monde dans mon appartement plusieurs soirs pendant qu’il dégaine l’appareil photo.
Tom est un homme un peu timide, drôle et bienveillant, et une oreille attentive le tout dans une apparente décontraction j’menfoutiste, oui, je décris bien les gens.
Ce qui est très différent de mes projets de photographe, c’est qu’avec Tom, c’est le moment qui crée la photo. Il ne prévoit rien, il ne me dirige pas, c’est à chaque fois mon humeur qui crée la séance, selon que je me sente bien ou non dans ma tête, fatiguée, joueuse, fatale, que j’ai un chapeau, une robe, une perruque, je sais que je serais à l’image de ce que j’ai envie de donner, et la douceur de ses images qui frisent pourtant l’insolence est exquise.
Il l’écrit dans une Interview qu’il accorde à Plateform Mag ici
« Ce qui m’intéresse c’est cette conquête d’une nouvelle féminité que les jeunes femmes des grandes villes inventent et réinventent sans cesse. Je ne sais jamais très bien dans quel déguisement je vais les trouver. Elles ont un goût du paradoxe lié à leur envies toujours changeantes. Ce n’est pas de la provocation au sens on le voit partout, c’est quelque chose de beaucoup plus intime qui m’intéresse chez elles. Ce sont vraiment des personnages multiples, elles ont une sorte de schizophrénie délicieuse qui est liée à la situation de la femme actuelle. Un mouvement incessant entre la femme et l’enfant, entre l’ingénue et la perverse qui fait semblant de ne pas savoir.Et moi j’essaye de saisir les instants les plus contradictoires de cette réalité. Du pyjama du dimanche au déguisement le plus hybride en passant par le sac à main, la vaisselle et les bas filés.
La spontanéité…C’est à l’image de ce qui se passe au moment de l’échange photographique. Les circonstances de nos rencontres sont hasardeuses. Je ne sais jamais par avance si la rencontre va marcher. Je leur laisse une totale liberté dans leurs mouvements et leurs actions. Je veux qu’elles interagissent d’elles-mêmes avec les objets et le lieu qui les entourent. La seule intention de ma part se joue dans la discussion, la connaissance que l’on fait l’un de l’autre sur le moment. »
Je vous mets ici mes images préférées des diverses rencontres photographiques avec Tom 🙂
Lorsque l’on me demande pourquoi je fais tout ce que je fais, et puis surtout la modèle alors que je suis photographe, je souris, les raisons me semblent si évidentes, tout m’enrichit, tout est transversale, et franchement, je n’aurais jamais rencontré des gens si intéressant et différent, sans cette passion dévorante pour l’image.
Cordialement,
Bisou.